GIRLSCHOOL

J’étais sur le point de poster dans la rubrique Bon, Brute, Truand la reprise de Race with the Devil de The Gun par Girlschool, avec une Kelly Johnson ravageuse, et puis je me suis dit que cette fille, ces filles, pionnières en leur genre, et si importantes pour les jeunes filles que nous fûmes en même temps qu’elles, méritaient bien qu’on leur consacre un topic. Que je leur consacre un topic. Qui le ferait sinon　?

Mais autant vous avertir de suite　: point ici de présentation exhaustive et documentée. Les filles de Girlschool aujourd’hui ne m’intéressent pas plus que ça, alors je ne vais pas m’embêter à faire leur bio. Pour l’encyclopédique, allez sur Wikipedia comme tout le monde.

D’ailleurs je ne sais rien livrer d’autre que du subjectif et du fragmentaire.

Et puis parler de rock’n’roll, quand on aime le rock’n’roll, c’est revenir obsessionnellement sur ces moments qui ont changé notre vie, c’est inlassablement refaire le récit des origines.
C’est entretenir le mythe le samedi soir jusqu’au petit matin avec quelques amis aussi fondus que vous, avant d’embrayer direct sur la brocante du bled d’à côté, les traits tirés mais tout excités de fouiller dans ces piles d’objets fragiles, poussiéreux, encombrants, au rebut, que sont les disques vinyles.


　
Girlschool donc.

C’était un après-midi en 1981. Je traînais mes guêtres comme souvent chez DISCORAMA, l’unique disquaire de Beauvais. Alors que je faisais négligemment défiler les disques dans le bac à nouveautés, je suis tombée sur un album de GIRLSCHOOL, 4 filles, 4 Anglaises qu’on ne voyait que de dos sur une pochette très moche comme seul le hard rock les affectionne encore aujourd'hui.

Du hard, beurk !, pas mon truc,
mais 4 filles... 4 filles de mon âge même...

Alors bon, je passai dans la cabine pour écouter.
Oui, à l’époque on écoutait les disques avant de les acheter en s’installant dans une cabine. Les parois étaient perforées de petits trous, sur deux côtés et peut-être même au plafond, dans mon souvenir du moins...
J'attendais du lourd, du lourdingue. Les métalleux sont des enclumes, pourquoi des métalleuses auraient-elles été différentes ?
Je tripotais la pochette moche. Le premier morceau c'était "C'mon let's go". Crépitement chaleureux du saphir, et vlam ! Let's go !
Et c'était ça…
Je restai plantée là, surexposée, irradiée dans ma cabine, transpercée.






C’est dans ces moments-là qu’on comprend de quoi la musique est capable. Elle s'enfonce au plus profond dans les chairs, pas avec précaution et finesse, mais avec une violence impitoyable.

Ces moments de grâce sont absolument fondateurs.

Tous ces groupes de rock qui change notre vie, disons qu'ils sont une pluie de météorites. Pour moi cette pluie a duré à peu près dix ans. De ma quatorzième à ma vingt-quatrième année, grosso modo. Depuis le ciel est resté d'un calme étonnant. Bien sûr je découvre encore plein de choses qui me plaisent, mais plus rien de comparable avec les émotions d'autrefois. Il n'y a plus de larmes, plus de vertiges, plus de bonheur indicible, plus de connexion directe avec le firmament, ce ciel étoilé de ma cabine, plus d'　"in-ouï" en somme...

Il y a cette période de la vie, la jeunesse, quand le monde des adultes ne nous concerne pas encore, où l'on est fécondé. Quelque chose s'ouvre, puis se referme.
Quant à moi, ce fut du rock'n'roll, et du plus pur, du plus minimal, du plus teigneux - qu'on ne vienne pas me chercher des poux dans la tête sur l'étroitesse de mes goûts musicaux - et Kelly Johnson fut l'une des perles les plus éclatantes. Une guitariste, l'une des très rares, qui avait choisi la légèreté, dans un clan où c'est loin d'être une vertu ! Non qu'elle manquât d'énergie ou de hargne, au contraire, et surtout pas pour faire joli ou féminin, mais simplement parce qu'elle valait mieux que les autres. Par légèreté, j'entends la capacité d'être porté par les airs, et d'y soulever les autres. Et aussi la connaissance parfaite de la note impondérable. Kelly Johnson jouait avec grâce, et c'est inestimable. Toute la laideur, la bêtise, la puanteur accumulées dans ce bas monde, et même la mort, n'y peuvent rien : la lumière continue de gicler par le moindre orifice. S'il m'arrive d'en douter, il y a au moins un moyen de m'en persuader, c'est d'écouter Kelly Johnson et ses Girlschool originelles. Aussi je lui voue une infinie gratitude.


　

Je découvre !

Merci,Isa !

Elle en parle si bien.

Je connaissais de nom. Je dois bien avouer que les girl groups, ça n'a jamais été trop mon truc mais là, ça décoiffe!

Merci de m'avoir rendu moins sectaire, Isa

C'est sympa quoique j'ai pas non plus l'impression de revenir d'une sorte de Nagasaki orgasmique.

Je me souviens avoir vu Girlschool en 1984 à Balard, grand temple du rock et du hard-rock des 80's, en première partie de Motörhead ou Metallica.
C'est assez révélateur, j'avais préféré Girlschool.

Bah oui Totor, je comprends, t'as plus 20 ans non plus.
La chair est triste, hélas, et j'ai écouté tous les disques.

Allez du rab : quand Lemmy cautionne

Du très bon, ça encore
Je me rappelle avoir découvert Girlschool à la même époque qu'AC/DC, BÖC et Motorhead, vers le milieu des 80's.
Bonne baffe quand même que ces 4 filles évoluant dans un univers essentiellement masculin (bon, y avait Lita Ford, aussi, mais ça m'a moins marqué), avec la même hargne (voire pire).
A noter que, sauf erreur de ma part, la bassiste a été la girlfriend de Lemmy

Isabelle a écrit:

Bah oui Totor, je comprends, t'as plus 20 ans non plus.
La chair est triste, hélas, et j'ai écouté tous les disques.

Je t'interdis de suggérer que je n'arive plus à forer les murs.

Merci Isa, je n'connaissais pas. La lecture du topic m'a fait penser à The Slits, mais là, il est tard, j'écouterai demain.

euh, vivement la fiche n°2...

totorbass a écrit:

Isabelle a écrit:

Bah oui Totor, je comprends, t'as plus 20 ans non plus.
La chair est triste, hélas, et j'ai écouté tous les disques.

Je t'interdis de suggérer que je n'arive plus à forer les murs.

Tu fores ce que tu veux, fors mes pontets.

Chips a écrit:

Du très bon, ça encore
Je me rappelle avoir découvert Girlschool à la même époque qu'AC/DC, BÖC et Motorhead, vers le milieu des 80's.
Bonne baffe quand même que ces 4 filles évoluant dans un univers essentiellement masculin (bon, y avait Lita Ford, aussi, mais ça m'a moins marqué), avec la même hargne (voire pire).
A noter que, sauf erreur de ma part, la bassiste a été la girlfriend de Lemmy

Non c'est Kim Mc Auliffe, la guitariste brune, membre permanente du groupe depuis le début avec Denise Dufort, la batteuse.

Kelly Johnson est morte d'un cancer en 2007, à 49 ans.

Quant à Lita Ford, ouais en solo c'est carrément affreux à mon goût, mais je vous en parlerai un de ces quatre, avec les Runaways, et si j'ai le courage parce que c'est un gros morceau, avec Kim Fowley.

Une vidéo vraiment sympa des filles de Girlschool filmées dans leur local de répète en 80

J'ai découvert Girlschool par l'intermédiaire de Motorhead, et notamment du "duo" entre les 2 groupes, en 1981, sur "please don't touch".
Ca envoyait bien, c'est sûr !
Avec leurs concurrentes de Rock Goddess, l'héritage bruyant des Runaways était bien assumé !

Isabelle a écrit:

totorbass a écrit:

Isabelle a écrit:

Bah oui Totor, je comprends, t'as plus 20 ans non plus.
La chair est triste, hélas, et j'ai écouté tous les disques.

Je t'interdis de suggérer que je n'arive plus à forer les murs.

Tu fores ce que tu veux, fors mes pontets.

J'aurais peur de manquer de potentiel Gamma irradiant, chocs thermiques, kilojoules toussa: je suis plutôt du genre romantique.

J'envie ton sens du récit, Isa.
Pour saluer ta prose et ton topic Girlschool que jeune freluquet j'avais raté, je remets un coup de "C'mon Let's go" (moins propre au niveau du son que ta version album mais l'énergie est bien là!).

un petit coup de push up pour Girlschool

et surtout pour Kelly Johnson (la fille de mon avatar que Jé était contrarié de pas reconaître)


en pleine période punk, les Londoniennes estampillées Hard rock, se réclamaient pourtant les filles naturelles de Led Zep et de T-Rex

ici elles ont l'air de bien se marrer, face un public de gamines pas encore endiablées en robe de bure années 70




aujourd'hui, Kelly Johnson ayant lâché l'affaire pour cause de mort précoce, c'est une autre blonde dont j'ignore le nom qui la remplace,
elle est sûrement bonne guitariste
parce que les trois autres, Kim, Enid et Denise, après tout ce temps, faut pas leur en raconter

Si j'en crois http://www.girlschool.co.uk/biography.htm, c'est Jackie Chambers, la remplaçante