Jusqu'en 74 , Genesis c'était avant tout des fresques délicates ou il était, entre autre, question de boite à musique, de bataille dans la foret d'Epping, de personages étranges comme sortis de chez Dickens ou Lewis Caroll.
Mais cette année là, Peter Gabriel, leader charismatique, fatigué de ce jeu de masques, piétine rageusement le petit jardin anglais ou ils évoluaient bourgeoisement, enfile un perfecto et entraine derrière lui ses réticents compagnons pour une sombre sarabande urbaine, direction New York.
Double album de 23 morceaux, "The Lamb lies down on Broadway" raconte l'errance hallucinée d'un jeune Portoricain, Rael, à travers la Grosse Pomme.
Avant tout projet de Gabriel, ce disque est d'une formidable cohérence tant visuelle (pochette Hipgnosis d'un beau noir et blanc qui tranche avec les pastels d'antan) que musicale : Collins, Banks, Rutherford et Hackett jouent reche, tendu, parfois cahotique, avec peu de stations de repos jusqu'au grandiose final.
Par sa force et son originalité, "The Lamb lies down.." s'extrait du carcan parfois imposé du progressif pour éclater comme un grand album de rock toujours, plus de 30 ans plus tard, d'une pertinente modernité.
Il est également étonnant de constater que la meme année, deux autres fers de lance du Prog. Yes et King Crimson sortiront aussi leurs oeuvres les plus "violentes" : "Relayer et "Red".
Extraits :
The Lamb lies down on BroadwayIn the CageThe Carpet CrawlersLilywhite LilithIn the rapids/ItL'année suivante le groupe jouera en tournée l'intégralité du concept jusqu'a ce que , Peter Gabriel, las, quitte Genesis. Phil Collins prendra les renes, ramenera tout le monde au cottage ou ils continueront la broderie à l'anglaise des débuts ( "A trick of the tail" & "Wind & wutherings ) pour terminer la décennie par un bel état des lieux ( "And then there were three").
"The Lamb" reste, à mes yeux ( et mes oreilles..) un grand disque qui reussit la parfaite passe de deux : etre à la fois le meilleur de Genesis (qui n'essaiera meme pas de réediter l'exploit) mais aussi le meilleur de Peter Gabriel, déjà ailleurs....